lundi 21 janvier 2008

Mon 810 : Sarkozy enfin libre

La suspension de la culture plein champ du maïs OGM Monsanto Mon 810 est une décision courageuse de N. Sarkozy. Il démontre une indépendance des lobbies qui lui faisait jusque là défaut. Monsanto dispose en effet de relais puissants dans la classe politique française. Ces relais se sont exprimés de façon publique, révélant ainsi leurs liens avec l’entreprise. N’osant s’en prendre frontalement à Sarkozy, le président de l’assemblée nationale, Bernard Accoyer, a ainsi critiqué brutalement les conclusions de la Haute Autorité pour les OGM qui étaient à l’origine de la décision présidentielle. Ce corps indépendant créé à la suite du Grenelle de l’environnement s’était pourtant borné à constater que le risque de pollinisation à distance et les effets sanitaires à long terme du Mon 810 n’étaient pas démontrés.

Pour moi, Bernard Accoyer révèle ainsi ce qu’il est : un lobbyist pour l’intérêt particulier d’une entreprise, contre l’intérêt général des français. Je classe dans la même catégorie Patrick Ollier, rapporteur UMP de la loi OGM, le député socialiste Jean-Yves le Déaut, ou le sénateur UMP Jean Bizet, qui ont protesté eux aussi avec vigueur contre cette atteinte intolérable… aux intérêts de Monsanto. L’efficacité du lobbysme repose d’ailleurs sur sa capacité à faire abandonner l’intérêt général par des hommes politiques pourtant élus pour le défendre au profit d’intérêts économiques spécifiques. Ces lobbyistes de choc sont aidés par des institutions comme la FNSEA qui elle aussi roule pour Monsanto. La grande agriculture intensive et subventionnée a cultivé le maïs en France, pays pour lequel il n’était pas adapté, et ou il consomme subventions et nappes phréatiques. Probablement par masochisme, Monsieur Lemétayer, président de la FNSEA, soutient Monsanto qui vends à prix d’or des semences à ses adhérents et défend avec acharnement quelques milliers d’hectares de maïs OGM pouvant détruire des écosystèmes et qui n’enrichissent que marginalement quelques agriculteurs. A moins que la FNSEA fasse du Mon 810 un test de sa liberté de polluer.

Hommes politiques soldés, fédération agricole à courte vue et dopée à la subvention : il est phénoménal qu’une grande multinationale d’origine américaine, dont les produits sont potentiellement menaçants pour l’environnement et les business model des agriculteurs, trouve des relais aussi agressifs contre l’intérêt général. Il s’agit malheureusement d’une tendance lourde sur laquelle je reviendrai : dans beaucoup de pays, et notamment en France et aux Etats-Unis, des grandes entreprises et des institutions, par le jeu du lobbysme, qui est une forme d’achat des hommes politiques, parviennent à faire triompher leur intérêt particulier au détriment de l’intérêt collectif. La National Rifle Association a ainsi réussi à éviter le désarmement de l’Amérique. Halliburton a été un facteur déclenchant de la guerre d’Irak qui lui a permis (ainsi qu’à Dick Cheney), de gagner quelques milliards de dollars.

L’enjeu est ainsi très large : est-il possible dans un état moderne ou fleurissent les lobbies de faire triompher l’intérêt général, ou sommes nous condamnés à le voir se faire écharper par de sordides intérêts particuliers ? L’avis de la haute Autorité sur les OGM, présidée par le courageux sénateur UMP Jean-François Le Grand, la position ferme de Jean-Louis Borloo et la décision de Nicolas Sarkozy sur le Mon 810 sont des lueurs d’espoir dans des sociétés de plus en plus polluées par le lobbysme.

Gaz de France : 4% de trop ?

GDF a demandé une augmentation de ses tarifs de 6% au 1er Janvier 2008. Le gouvernement lui a accordé 4%. Commentaire du journal « Les Echos » : « les marchés financiers ne vont pas apprécier ».
Etrange, n’est-ce pas. L’augmentation du prix d’un monopole, pour un produit qui est consommé par des millions de français, devrait se faire en fonction des marchés financiers ? Les marchés financiers sont déçus si une entreprise ne maximise pas sa rente au détriment du public ?
Depuis cinq ans les tarifs GDF ont augmenté de plus de 50%... Ses clients n’ont pas la possibilité de changer de mode d’énergie ni de réduire leur consommation à court terme. GDF n’est pas au bord de la faillite, bien au contraire : ses profits 2007 avoisineront probablement les deux milliards d’euros. La rente de monopole se porte bien.

Le prix du gaz devrait être fixé non en fonction du seul intérêt de GDF ou des supposés diktats du marché financier mais, comme pour les « utilities » anglo-saxonnes, de façon à minimiser le fardeau des clients finaux tout en laissant à l’entreprise un niveau de profit raisonnable, qu’elle aurait loisir d’augmenter en améliorant sa productivité. Pour une PMI, surtout si elle est consommatrice d’énergie, pour un particulier à bas revenu, les hausses successives du tarif du gaz détruisent la qualité de vie, le revenu disponible, et le pouvoir d’achat.

Les marchés financiers ne devraient pas s’en émouvoir. Car pour « les marchés financiers », GDF n’est pas l’alpha et l’omega. Il s’agit simplement d’une des entreprises énergétiques européennes, de loin pas la plus importante. Sauf à penser que limiter les hausses de prix de GDF est un signal terrifiant que l’intérêt général pourrait limiter la rente de toutes les entreprises similaires.
Il ne serait pas raisonnable d’empêcher totalement GDF de répercuter dans ses tarifs la hausse du prix de ses approvisionnements et de mettre ses comptes dans le rouge. Mais il est probable que même avec des prix bloqués en 2008 (soit 2% de moins que l’inflation probable), compte tenu des fortes augmentations précédentes, GDF pourrait encore vivre confortablement, et gagner quelques centaines de millions d’euros.
Les 4% de hausse sont 4% de trop.